Œuvre monumentale de la littérature, du théâtre et pour le public, écrite de 1918 à 1923, Le Soulier de satin n’est créé qu’en 1943, à la Comédie-Française, par Jean-Louis Barrault qui déploie alors tous les efforts et affronte tous les risques pour obtenir l’autorisation de Claudel et la faire jouer en pleine occupation allemande.
Ce «drame d’amour » en forme de traversée de vingt ans, construite en quatre journées, narre l’histoire de Rodrigue et Doña Prouhèze, épouse du gouverneur Don Pélage, à l’époque des conquistadors et des navigations sur des mers plus ou moins connues. « Nous nous sommes attaqués à cette épopée avec humilité et gourmandise, dit Éric Ruf, approchant le secret du poète caché au sein de ces quatre Journées, ou comment Claudel inscrit-il ses amours illicites dans une liturgie aussi savante que personnelle. » La langue de l’auteur avec laquelle le metteur en scène chemine depuis toujours – sa musicalité et son faste – lui semble avant tout extrêmement concrète. Elle se déploie dans une scénographie s’appuyant sur le rapport historique entre la machinerie de théâtre et la marine à voile, faisant la part belle à ces mots du préambule au Soulier : « Il faut que tout ait l’air provisoire, en marche, bâclé, incohérent, improvisé dans l’enthousiasme ! Avec des réussites, si possible, de temps en temps, car même dans le désordre il faut éviter la monotonie. L’ordre est le plaisir de la raison: mais le désordre est le délice de l’imagination. ». Au cœur de cette adaptation d’environ 7 heures et dans le souvenir de Peer Gynt qu’Éric Ruf avait monté en 2012, la joie sera le guide pour cette immense pièce de troupe.
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